WikiLeaks ou "la guerre de l'information"

WikiLeaks ou "la guerre de l'information"
La décision de WikiLeaks de divulguer une liste de sites internationaux jugés par les Etats-Unis vitaux pour leurs intérêts fournit à des groupes comme Al Qaïda une "liste de cibles" pour d'éventuels attentats, a déploré lundi le département d'Etat américain. /Photo prise le 2 décembre 2010/REUTERS/Petar Kujundzic ((C) REUTERS)

Attaques informatiques, pressions politiques... Tout est bon pour mettre hors ligne le site qui divulgue les notes diplomatiques américaines. C'était sans compter sur la rébellion des internautes.

Par Le Nouvel Obs
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WikiLeaks ou "la première guerre de l'information". L'expression a été lâchée par l'essayiste américain John Perry Barlow. "La première guerre de l'information est maintenant engagée. Le terrain de cette bataille est WikiLeaks. Vous êtes les troupes", écrit-il sur Twitter.

Un message aujourd'hui repris par le groupe de hackers des Anonymous qui appellent tous les internautes à s'engager et "se battre [pour] le futur de l'Internet". Un discours belliqueux qui reflète la tension entre les pro- et les anti-WikiLeaks.

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Avec la divulgation au compte-gouttes de 251.287 notes diplomatiques américaine confidentielles, le site WikiLeaks ne s'est pas fait que des amis, loin de là... La manœuvre a largement été dénoncée par les Etats-Unis, parlant de "crime". Un message repris à l'international par de nombreux pays. "Il faut qu'on soit très solidaires au niveau des Etats pour lutter contre ce qui est une menace" contre "l'autorité et la souveraineté démocratique", a insisté le porte-parole du gouvernement français, François Baroin.

 

Pressions politiques, attaques informatiques et interdits bancaires

Les Etats-Unis se sont échinés à entraver les divulgations de WikiLeaks. Amazon a, par exemple, cessé d'héberger WikiLeaks à la suite d'une requête du sénateur américain Joe Lieberman, sans plus d'explications, laissant planer un soupçon de pressions politiques. Par la suite, la société américaine EveryDNS.net a tout simplement effacé le nom de domaine "wikileaks.org", arguant d'attaques informatiques incessantes contre le site. Des attaques bien réelles, mais qui ne suffisent pas à légitimer la suppression d'un nom de domaine déposé.

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Depuis le début de ses révélations, WikiLeaks est la cible de nombreux pirates qui tentent de rendre le site inaccessible. Des pirates personnifiés par le hacker nationaliste Jester qui a revendiqué batailler contre "WikiLeaks [qui] met en danger la vie de nos soldats".

Après les cyber-attaques, WikiLeaks a dû jouer avec les interdits bancaires. Le premier a été le service de paiement en ligne PayPal qui a décidé de "restreindre de façon permanente l'accès au compte utilisé par WikiLeaks", alors que la société collectait de nombreux dons faits à l'organisme. Par la suite, MasterCard et Visa ont bloqué toute transaction vers le site.

 

Appel au boycott et au DDoS

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Il n'en fallait pas plus pour que de nombreux internautes se soulèvent en faveur de WikiLeaks. Un certain nombre d'entre eux ont ainsi créé des "sites miroirs", permettant de toujours garder une version accessible du site. De même, l'ensemble des documents révélés ne cesse de s'échanger via les réseaux peer-to-peer, en particulier sur le site The Pirate Bay, afin de ne jamais disparaître.

Par ailleurs, le groupe de hackers des Anonymous a affiché un soutien clair à WikiLeaks, appelant les internautes à "boycotter" PayPal et même à l'attaquer avec des déni de service (DDoS) visant à saturer le site en requêtes. Le blog officiel de la société a ainsi été mis hors ligne, avant des attaques contre le site officiel Paypal.com.

Un appel à "retirer tous ses dollars" de PayPal a également été lancé par le site The Pirate Bay, s'inspirant de l'initiative d'Eric Cantona pour les banques.

Enfin, le site officiel de MasterCard a également été mis hors ligne après plusieurs attaques revendiquées par les Anonymous. La nouvelle cible étant le site Visa.com.

 

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La France, relai des Etats-Unis

En France, WikiLeaks soulève également son lot de réactions. Du côté du gouvernement, le ministre chargé de l'Economie numérique, Eric Besson, a réclamé la fin de l'hébergement du site par le Français OVH, réfutant toute "censure".

Une "action [qui] ne semble se baser sur aucune loi qui rende le site illégal", souligne le Parti Pirate. Au contraire, "elle semble se baser sur la préservation des élites dirigeantes que la divulgation des informations en possession du site WikiLeaks pourrait mettre à mal", avance le parti.

"C'est la première fois que nous observons une tentative de censure à l'échelle internationale d'un site dont la vocation première est la transparence", s'est indigné Reporters Sans Frontières. "Nous ne pouvons qu'être sidérés par le fait que des pays comme la France et les États-Unis alignent soudain leur politique en matière de liberté d'expression sur celle de la Chine", a poursuivi RSF.

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L'hébergeur OVH a saisi les tribunaux sur la "légalité ou pas de ce site sur le territoire français". Autant à Lille qu'à Paris, les tribunaux de grande instance ont rejeté les requêtes, renvoyant OVH devant ses responsabilités. Un répit, avant une nouvelle tentative d'entrave...

"Deux camps s'affrontent dans un combat qui pourrait être l'un des plus importants que nous ayons à mener pour l'avenir de nos démocraties", résume enfin la Quadrature du net.

 

(Boris Manenti - Nouvelobs.com)

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