DIAPORAMA - Des incendies domestiques se déclarent toutes les deux minutes en France, ravagent 10.000 logements, font des centaines de blessés ainsi qu'une centaine de décès. Avec l'amélioration demandée des performances thermiques des bâtiments, les quantités d'isolants augmentent, ce qui n'est pas sans poser problème face à leur tenue au feu. Reportage au pôle européen de sécurité CNPP Vernon (Eure).

Les quantités toujours accrues de produits isolants dans les constructions actuelles posent désormais la question de leur résistance au feu, au moment où le ministère du Logement présente deux exigences contradictoires. Car d'un côté, il est maintenant demandé de concevoir des bâtiments économes en énergie et donc particulièrement bien isolés. Mais Cécile Duflot a également réclamé de diviser par deux le nombre de victimes d'incendies en France, qui se comptent encore par centaines chaque année. "Parmi les incendies, les plus dangereux sont ceux de toitures et de terrasses", expliquent Gaëtan Fouilhoux et Bruce Le Madec, de Rockwool France. Car le plus souvent, ces départs de feu surviennent lors de travaux, de construction ou de rénovation de l'étanchéité, "à un moment où il existe un stockage massif et provisoire de matériaux de construction", précisent les deux experts. Conjuguée à la présence de fondoirs à bitume et de chalumeaux, nécessaires au chantier, l'accumulation de matériaux isolants peut donc s'avérer explosive.

 

Des démonstrations grandeur nature
La société Rockwool a donc organisé, avec le concours du Centre National de Prévention et de Protection (CNPP) de Vernon (Eure), plusieurs essais grandeur nature afin d'illustrer les différents comportements des matériaux isolants face aux flammes (voir l'encadré en page 2). Parmi les tests réalisés, trois feux intérieurs ont été simulés dans trois bacs métalliques isolés avec divers produits : polystyrène expansé (PSE), polyisocyanurate (PIR) et laine minérale (MW). Des structures équivalentes à des toitures, composées d'un bac acier, d'une couche de l'isolant d'intérêt et d'une membrane d'étanchéité, ont été placées au-dessus d'un bûcher naturel (non réalimenté) de bûchettes de dimensions calibrées.

 

Quelques instants après la mise à feu, les comportements se sont rapidement dessinés. Le polystyrène expansé a présenté une très faible résistance au feu et une tendance à fondre, en générant des gouttelettes enflammées qui, sur un immeuble, se seraient répandues sur la toiture et la façade, augmentant le risque d'embrasement en d'autres points de la construction, voire à sa base. La résistance au feu de ce matériau d'isolation est donc considérée comme quasiment nulle, avec un temps compris entre 5 et 10 minutes, avant sa complète combustion. Le polyisocyanurate a, pour sa part, présenté une meilleure tenue, de l'ordre de 10 à 20 minutes, un temps considéré comme le minimum nécessaire pour une intervention en force des pompiers. "Mais ce matériau a la fâcheuse tendance de générer des fumées nocives, notamment de l'acide cyanhydrique, beaucoup plus toxique que le monoxyde de carbone", poursuivent Gaëtan Fouilhoux et Bruce Le Madec. Ces deux matériaux isolants combustibles produisent d'importantes quantités de fumées, liées à leur combustion incomplète. Troisième isolant testé, la laine de roche, a, quant à elle, démontré une meilleure résistance au feu, pendant les 20 minutes de l'essai. Théoriquement, sa tenue serait même supérieure à 60 minutes.

 

Découvrez les essais en images dans les pages suivantes

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Essais de tenue au feu

CNPP Rockwool
CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Le coût des incendies domestiques en France a été évalué à 1,3 milliard d'euros, soit deux fois et demi le montant de la facture des cambriolages, ou encore 30 % de plus que celle des dégâts des eaux. La tenue au feu des isolants serait donc un argument de poids notamment pour les compagnies d'assurance, dont certains représentants assistaient aux démonstrations.

 

Les autres essais :
CNPP Rockwool
CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Façade : on retrouve quatre façades sur lesquelles on allume un début de feu afin de tester la résistance de différents matériaux, mais aussi la propagation du feu aux étages supérieurs. À droite, on retrouve deux maquettes de bardage, et à gauche, deux maquettes sous enduits. La première façade sur laquelle le feu se propage en une dizaine de minutes est au final celle en polyisocyanurate (3e en partant de la gauche). Puis la seconde est le polystyrène (1re en partant de la gauche). Les deux débuts de feux se propagent rapidement et dégagent une fumée noire nocive en une vingtaine de minutes. Après plus de 30 minutes, la façade recouverte de laine de roche sous forme de sandwich montre des dégâts moins importants, ainsi que très peu de propagation le long de la façade. Les dégâts sur les panneaux PIR sont moins importants également, le feu se diffusant moins grâce aux panneaux.

 

CNPP Rockwool
CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Room corner test : il s'agit ici de tester et d'examiner la réaction de différents matériaux isolants au feu en espace clos. En premier lieu, se situe à gauche (1) la laine de roche (LdR), (2) le panneau-sandwich laine de roche (Sdw LdR), (3) le polystyrène expansé (EPS), (4) le polyisocyanurate (PIR) et (5) le panneau-sandwich polyisocyanurate (Sdw PIR). La première réaction observée est une fumée jaunâtre toxique s'échappant du panneau-sandwich polyisocyanurate (5), au bout de quelques minutes seulement. Cette première réaction est suivie de près par celle du PIR, qui dégage également de la fumée quelques minutes après. La laine de roche quant à elle, d'origine minérale, a résisté au début de feu et n'a pas produit de fumée toxique, se différenciant ainsi des autres isolants.

 

S.Z.

Laine de roche

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
La première toiture à être soumise aux flammes est isolée par de la laine de roche.

Polyisocyanurate

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Le deuxième bac de toiture acier est recouvert d'un isolant PIR.

Polystyrène expansé

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
La troisième maquette de toiture est, pour sa part, isolée par une couche de polystyrène expansé. A noter que l'épaisseur mise en œuvre n'a pas d'influence réelle sur le comportement des matériaux face au flammes.

Essai en cours

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Les trois bûchers sous toitures ont été enflammés depuis quelques instants permettant de visualiser le comportement des différents isolants. On note un dégagement de fumée notable du bac n° 2 (PIR).

Fusion du polystyrène

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Outre un important dégagement de fumée noire, le polystyrène est fusible et coule le long des rigoles et de la façade. Les petites gouttelettes incandescentes sont alors susceptibles d'allumer des foyers secondaires.

Après - laine de roche

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
L'isolant minéral a, semble-t-il, bien résisté à une exposition de 20 minutes à des flammes en sous-face.

Après - PIR

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Le bac de toiture numéro 2, isolé au moyen de polyisocyanurate, a présenté une résistance au feu intermédiaire.

Après - PSE

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
La totalité du polystyrène expansé a fondu pendant l'essai. Le matériau ne présente aucune capacité de résistance et risque même d'accroître la propagation d'un sinistre.

Room corner test

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Comme son nom l'indique, un foyer est placé dans le coin d'une maquette de pièce dont l'intérieur est revêtu de différents isolants. La puissance calorifique atteinte pour observer un phénomène de "flash over" (embrasement généralisé) est d'environ 300 kW.

Façades

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Les quatre maquettes de 9 mètres de haut testées au moyen de bûchers naturels disposés à leur base et permettant de simuler un feu de façade (au standard d'essai britannique).

Spectaculaire

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Encore une fois, le polystyrène ne fait pas preuve d'une bonne tenue au feu, la façade s'embrasant totalement en une vingtaine de minutes.

Dégâts

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CNPP Rockwool © Grégoire Noble
Les dégâts sur les quatre façades.