Huile de palme : l’Indonésie signe un moratoire de trois ans

Le premier producteur mondial de cette huile végétale controversée suspend toute mise à disposition de nouvelle terre pour la plantation de palmiers à huile dans le pays. Non sans arrière-pensée.

 L’huile de palme fait vivre des millions de personnes dans le monde, dont 4,5 millions rien qu’en Indonésie et Malaisie.
L’huile de palme fait vivre des millions de personnes dans le monde, dont 4,5 millions rien qu’en Indonésie et Malaisie. Reuters

    C'est une victoire en trompe l'œil pour les associations qui luttent contre l'exploitation de l'huile de palme, réputée destructrice des forêts. Ce jeudi, le président indonésien Joko Widodo a en effet signé un moratoire de trois ans sur le développement de toute nouvelle plantation de palmiers à huile tandis que l'Union européenne planche actuellement sur une interdiction de son utilisation dans les agrocarburants à partir de 2030.

    Ce moratoire suspend toute mise à disposition de nouvelle terre pour la plantation de palmiers à huile dans le pays, premier producteur mondial de cette huile végétale controversée abondamment utilisée par les industries agroalimentaire et cosmétique, en plus de faire office de carburant.

    « Assurer le développement durable »

    Selon le vice-ministre au ministère de la Coordination des affaires économiques, Prabianto Mukti Wibowo, cette suspension « vise à améliorer la gestion des plantations durables de palmiers à huile, garantir la sécurité juridique, accroître la productivité des plantations de petits propriétaires, assurer le développement durable et contribuer à la réduction des gaz à effets de serre.

    En effet, face à l'explosion de la demande mondiale, les plantations se sont multipliées ces dernières années à Sumatra, en Papouasie et dans la partie indonésienne de l'île de Borneo, générant d'énormes bénéfices pour les sociétés exploitantes et garantissant de confortables recettes fiscales au gouvernement. Mais cette croissance s'est souvent faite au détriment de la forêt primaire, rasée pour laisser la place aux plantations, et des nombreuses espèces en voie de disparition qu'elle abrite, sans oublier la multiplication des incendies pendant la saison sèche en raison du défrichement illégal.

    Un timing pas anodin ?

    L'idée d'un tel moratoire avait été avancée en 2015, après que des incendies avaient placé toute une partie de l'Asie du Sud-Est sous un épais brouillard toxique. Le Forum indonésien pour l'environnement (Walhi) a salué dans un communiqué la décision du président Widodo comme « un premier pas positif pour une nouvelle gestion des ressources naturelles, particulièrement dans le secteur de l'huile de palme », ajoutant toutefois qu'idéalement, il faudrait que le moratoire soit de 25 ans.

    Par ailleurs, le timing semble très choisi. La décision indonésienne survient alors que le pays bataille aux côtés de la Malaisie contre le souhait du Parlement européen d'interdire l'utilisation de l'huile de palme dans les agrocarburants à partir de 2030. Il faut dire que l'huile de palme fait vivre des millions de personnes dans le monde, dont 4,5 millions rien qu'en Indonésie et Malaisie.