Entre 1981 et 2005, le nombre des pauvres dans le monde a diminué de 500 millions, et leur proportion dans la population totale est tombée de 52 % à 26 %. Cette bonne nouvelle – relative, puisque l'Afrique ne profite pas de cette embellie – est extraite d'un rapport publié, le 26 août, par la Banque mondiale, et intitulé "Les pays en développement sont plus pauvres qu'on le croyait, mais le combat qu'ils mènent contre la pauvreté porte ses fruits".
En effet, la Banque a profondément révisé ses données sur la pauvreté. Elle a pris en compte 675 enquêtes conduites auprès des ménages dans 116 pays en développement représentant 96 % des populations de cette catégorie de pays. Les résultats obtenus au titre de l'année la plus récente sont basés sur des entretiens avec un échantillon aléatoire de 1,2 million de ménages.
A partir de quel niveau de revenu est-on pauvre ? Le seuil de pauvreté moyen est établi à 1,25 dollar par jour (valeur 2005) dans les vingt pays les moins développés. Mais cette moyenne fluctue selon la richesse du pays. C'est ainsi que le seuil de pauvreté est plus proche de 1 dollar par jour en Inde ou en Chine et de l'ordre de 2 dollars dans les régions à revenu intermédiaire, comme l'Amérique latine ou l'Europe de l'est.
"Les anciennes données prêtaient à penser que le nombre de pauvres était tombé en dessous du milliard de personnes", note la Banque, "mais en tenant compte de l'augmentation du coût de la vie dans les pays en développement, leur nombre est désormais estimé à 1,4 milliard de personnes", contre 1,9 milliard en 1981. "Ces nouvelles données confirment que le monde atteindra probablement le premier objectif de développement pour le Millénaire arrêté par l'ONU, consistant à réduire de moitié le taux de pauvreté de 1990, au plus tard en 2015, commente Justin Lin, chef économiste de la Banque. Le taux de pauvreté a baissé d'environ un point par an depuis 1981."
Les progrès sont très contrastés selon les régions. L'Asie de l'Est, qui affichait le taux de pauvreté le plus élevé du monde avec 80 % en 1981, a obtenu des résultats si spectaculaires que le taux y est tombé à 18 % et que 600 millions de personnes y sont sorties de la très grande misère.
500 MILLIONS DE PERSONNES POURRAIENT BASCULER À NOUVEAU DANS LA PAUVRETÉ
Le taux de pauvreté recule aussi en Asie du Sud, en Amérique latine, aux Caraïbes, au Moyen Orient et en Afrique du Nord, mais pas suffisamment pour que le nombre des très pauvres baisse.
En revanche, l'Afrique subsaharienne n'a pas vu diminuer son taux de pauvreté, stabilisé à 50 % depuis vingt-cinq ans. Pire, le nombre de ses déshérités (en moyenne, moins de 0,70 dollar de revenu par jour) a pratiquement doublé, passant de 200 à 380 millions de personnes. A ce rythme, un tiers du milliard de pauvres que comptera le monde en 2015 se trouvera en Afrique subsaharienne.
Le rapport de la Banque souligne que, dans le monde, "la plus grande partie des 500 à 600 millions de personnes sorties de l'extrême pauvreté entre 1981 et 2005, d'après le critère de 1,25 dollar par jour, sont toujours pauvres." Elle déplore qu'"aucun progrès notable n'ait été réalisé pour franchir le seuil de 2 dollars par jour (…) En effet, le nombre des personnes vivant avec un revenu situé entre 1,25 et 2 dollars par jour a doublé, passant de 600 millions à 1,2 milliard", et le total des personnes vivant avec moins de 2 dollars par jour s'élève à 2,5 milliards, chiffre inchangé depuis 1981.
L'inflation des prix des matières premières et du pétrole avait débuté dès 2003, mais ses effets ne se sont pas fait sentir fortement dans les budgets des ménages avant 2007.
Depuis que la Banque a refait ses comptes, le renchérissement des produits de base, comme le riz, le blé ou le maïs, a significativement dégradé les budgets des ménages des pays en développement. Les experts estiment que 500 millions de personnes pourraient, de ce fait, basculer à nouveau dans la pauvreté. Les émeutes qui ont éclaté en Afrique ou en Asie du Sud-Est depuis un an en témoignent.
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