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Primates

Le Maroc tente de sauver les magots

Le macaque de Barbarie est peu à peu en train de disparaître de ses terres au Maroc et en Algérie. Face à ce danger, le Maroc lance un plan de sauvegarde sur plusieurs fronts. Timidement suivi par l'Algérie.

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Macaque de Barbarie

Il resterait entre 3.000 et 10.000 macaques berbères au Maroc, contre 17.000 il y a 30 ans

©NOVACK N./HorizonFeatures/Leemage/AFP

"Si rien n'est fait, cette espèce disparaîtra dans dix ans", met en garde l'affiche sur la vitre d'un vieux 4X4. A son bord, Ahmed Harrad - président de l'association Barbary Macaque Awareness & Conservation (BMAC), une des plus engagées dans la défense du singe magot au Maroc. Il sillonne le nord du pays pour convaincre la population de protéger ce macaque. Car celui qui est, avec l’homme, le seul représentant de l’ordre des primates sur le continent africain et européen est peu à peu en train de disparaître. Pour l'Union internationale de conservation de la nature (UICN), l'espèce est même menacée d'extinction. En cause, la surexploitation des forêts qui réduit son habitat naturel, le braconnage à des fins d'exportation illégale vers l'Europe et l'inconscience des touristes qui nourrissent ce primate aux dépens de sa santé.

Il n'y a déjà plus de magots depuis 1900 en Tunisie. Entre 3.000 et 10.000 vivraient aujourd'hui au Maroc, contre 17.000 il y a 30 ans, dans les zones montagneuses du Rif (nord) et du Moyen Atlas. En Algérie, aucun chiffre récent n'est disponible, alors qu'ils étaient estimés à 5.500 il y a 30 ans. Leurs zones de présence, surtout dans les massifs de Kabylie, auraient diminué de moitié. Pourtant dans ce pays, le macaque ne figure pas sur la liste des espèces menacées, regrette l'UICN, il ne bénéficie donc pas des interdictions totales de capture, détention et commercialisation prévues par cette liste. Enfin, environ 230 macaques de Barbarie - introduits d'Afrique du nord - vivent également à Gibraltar où ils constituent une célèbre attraction touristique.

Face au danger, le Maroc a lancé un plan de sauvegarde

En 2016, sur proposition notamment du Maroc, l'espèce a été classée sur l'annexe I de la Cites, la Convention sur le commerce international des espèces menacées d'extinction, afin qu'elle soit considérée comme "très protégée". Ce qui "permettra au Maroc et à d'autres pays de fédérer leurs efforts pour lutter contre le commerce illégal du magot", se félicite Zouhair Ahmaouch, cadre au Haut commissariat aux eaux et forêts de ce pays. De fait, face au danger, le Maroc a lancé un plan de sauvegarde et compte sur une société civile "très active" pour protéger l'espèce, souligne Violeta Barrios de l'UICN Méditerranée."Nous travaillons sur deux axes: la surveillance, le suivi et le recensement de cette espèce dans le Rif, ainsi que la sensibilisation des populations locales afin qu'elles deviennent des actrices actives de sa sauvegarde", explique Ahmed Harrad à l'AFP.

D'après lui, le macaque de Barbarie est vendu illégalement entre 1.000 et 3.000 dirhams (entre 100 et 300 euros) à des clients en Europe, au mépris de la législation marocaine qui interdit ce commerce. "Beaucoup d'étrangers achètent des singes magots pour en faire des animaux de compagnie". Et si le magot, bébé, est "calme et mignon", une fois adulte, il peut vite devenir encombrant: "il casse, mord, se bagarre avec les enfants, grimpe aux rideaux. Ces primates sont alors abandonnés par leurs propriétaires" relève Ahmed Harrad. Dans ces situations, le Maroc, qui a pourtant la responsabilité de conserver ce patrimoine, "ne peut pas rapatrier les singes lâchés en Europe", indique Zouhair Ahmaouch à l'AFP, "car nous ne savons pas s'ils viennent de Gibraltar, d'Algérie ou du Maroc". Du côté d'Alger, une stratégie de préservation est en cours et doit être finalisée fin 2017, indique à l'AFP l'UICN Méditerranée, qui envisage aussi de durcir les sanctions.

A l'école, les élèves apprennent "l'importance de l'espèce"

Au Maroc, s'ils restent difficilement approchables dans le Rif, vivant encore à l'état sauvage, les macaques de Barbarie sont domestiqués dans les forêts du Moyen Atlas, où les touristes s'amusent à leur donner à manger. Un comportement qui provoque des "problèmes sanitaires, comme l'obésité, qui se répercute sur leur capacité de reproduction", regrette Lahcen Oukennou, responsable au parc national d'Ifrane. Confronté au même problème, Gibraltar impose une amende de plus de 500 euros aux touristes qui leur donnent à manger.

Le plan du Maroc comprend par ailleurs des mesures de "réhabilitation et de reconstitution des habitats de cette espèce", souligne Anouar Jaoui, directeur du parc national de Talassemtane (nord), où vivent à l'état sauvage des dizaines de magots. En clair : il s'agit de reboiser et régénérer des espèces forestières dans les milieux où vivent les magots, et d'interdire l'élevage dans ces zones, explique un responsable du Haut commissariat. Le Maroc doit encore "faire des progrès pour faire respecter les lois de protection de la faune sauvage" sur le terrain, relève Mme Barrios, en prônant la poursuite des campagnes de sensibilisation. Comme celles menées dans les forêts du Moyen Atlas : là, le Haut-commissariat aux eaux et forêts organise des "sessions de sensibilisation au profit des touristes", explique Lahcen Oukennou. A l'école, les élèves sont confrontés à la problématique et apprennent "l'importance de l'espèce", souligne-t-il.

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