Le tabou de la «revente de patients» a été brisé

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Santé- SuisseLe tabou de la «revente de patients» a été brisé

Pour «obtenir» des malades, des hôpitaux et des spécialistes soudoient des généralistes. L'un d'eux a rompu l'omerta.

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La conférence du Dr. Daniel Flach, médecin de famille bernois, il y a une semaine, fera date. S'exprimant lors d'un congrès sur les tarifs forfaitaires de soins à Berne, il a mis au jour ce qui, apparemment, se disait en coulisses. Le soignant a expliqué comment des hôpitaux et des spécialistes versent des rétro-commissions aux généralistes, afin qu'ils leur envoient des patients, révélait jeudi la «Nordwestschweiz». Ainsi, des cliniques privées auraient par exemple payé 500 fr par patient assuré en privé ou en semi-privé qui leur a été envoyé. Ou encore, des hôpitaux publics auraient amorti leurs appareils d'imagerie par résonance magnétique en se faisant «livrer» des patients, pour lesquels ils verseraient des «indemnités».

Sanctions possibles

Pour Peter Indra, ex directeur adjoint de l'Office fédéral de la santé publique et actuel chef de la division «prestations de santé» du Département de la santé du canton de Bâle, la situation est grave: «Il ne s'agit plus de guider les malades vers les soins les plus appropriés, mais vers ceux qui rapportent le plus», s'offusque-t-il. Urs Stoffel, chirurgien et membre du comité central de la Fédération des médecins hospitaliers (FMH) a, lui, déclaré étudier «la possibilité de déférer nos membres qui se seraient rendus coupables de ce genre de malversations devant le comité d'éthique». Le personnel administratif ne serait pas inquiété, «même si leur conduite est contestable». Daniel Flach a toutefois refusé de donner des noms, «ne souhaitant clouer personne au pilori.»

«Discutable mais pas illégal»

Contacté, l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) estime «qu'il est préoccupant et discutable d'un point de vue éthique si le libre choix du patient est rendu impossible par de telles pratiques; cela augmente le risque que des prestations inutiles soient administrées au détriment du patient.»

Toutefois ces paiements ne sont, a priori pas illégaux: «La Loi fédérale sur l'assurance-maladie (LAMal) exige du fournisseur de prestations qu'il redonne aux patients les avantages directs ou indirects qu'il perçoit. Si un médecin reçoit ainsi de l'argent, ou bénéficie de rabais, il doit les céder aux patients ou aux assureurs», explique Daniel Dauwalder, porte-parole de l'OFSP.

Jusqu'à présent, l'office déclare ne pas «avoir eu d'indices lui permettant de croire que de telles pratiques étaient répandues.» Il va toutefois examiner si des mesures sont nécessaires.

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