Températures, surfaces, durée... : tout ce que l'on sait de nouveau sur la survie du virus Covid-19
Décidément bien trop tenace, le nouveau coronavirus serait capable de rester actif dans l'air pendant trois heures! C'est en tout cas la mauvaise nouvelle révélée par des chercheurs financés par le CDC américain, une agence de santé publique. Pour mener ces travaux, les scientifiques ont comparé la durée pendant laquelle on trouvait le virus du Sars et du Covid-19 sur différentes surfaces et dans l'air.
- Publié le 19-03-2020 à 13h18
- Mis à jour le 19-03-2020 à 19h33
Décidément bien trop tenace, le nouveau coronavirus serait capable de rester actif dans l'air pendant trois heures! C'est en tout cas la mauvaise nouvelle révélée par des chercheurs financés par le CDC américain, une agence de santé publique. Pour mener ces travaux, les scientifiques ont comparé la durée pendant laquelle on trouvait le virus du Sars et du Covid-19 sur différentes surfaces et dans l'air.
Pour ce faire, ils ont utilisé des brumisateurs et ont pulvérisé les virus sur différents matériaux. Résultat : on retrouve des particules en suspension dans l'air pendant 3 heures, soit la durée de l'expérience. Sur des surfaces en plastique, des particules subsistent jusqu'à 3 jours, 2 jours sur de l'acier inoxydable, 24h sur du carton et 4 h sur du cuivre. La quantité de virus diminue par 2 toutes les heures environ. Les deux coronavirus ont un comportement similaire.
Réalisée en conditions de laboratoire, cette étude ne devrait cependant pas trop nous inquiéter. Rien ne dit en effet que la simulation par brumisateur reproduit correctement les gouttelettes issues d'un éternuement ou d'une toux.
Les auteurs de l'étude, eux-mêmes, reconnaissent qu'il faut interpréter avec prudence ces résultats. "Un paramètre important de la contamination semble être la charge virale, la quantité de virus autant que son mode de déplacement", précisent-ils.
L'avis d'un virologue et chercheur belge
Au Dr Jean Ruelle, virologue et chercheur qualifié à l’Institut de recherche expérimentale et clinique de l’UCLouvain, qui nous avait déjà livré certains éléments sur la survie de ce virus, nous avons demandé de faire le point sur l'état des connaissances à l'heure actuelle. Et il y a du nouveau…
"Cet article apporte effectivement des éléments neufs, concède Jean Ruelle. Jusqu'ici les études avec SARS CoV-2 étaient une recherche du matériel génétique viral présent sur les surfaces : ceci donnait une indication de la contamination mais ne donnait pas de réponse sur la viabilité du virus, c'est-à-dire sa capacité à être infectieux et contaminer d'autres personnes. Si on peut se permettre une comparaison, c'est un peu comme si on détectait de l'ADN humain à partir d'un squelette".
En quoi cette étude est-elle dès lors différente? "Cette fois, les chercheurs ont étudié la viabilité du virus en mimant en laboratoire une contamination de différents matériaux en générant des aérosols, et en comparant SARS CoV-1 (épidémie de 2003) et le virus actuel (SARS CoV-2 ou Covid-19). Il ressort que le comportement dans l'environnement a l'air similaire pour les deux virus : donc les différences dans les deux épidémies ne semblent pas être liées aux caractéristiques physico-chimiques du virus dans l'environnement, mais davantage aux transmissions sans symptômes ou avant l'apparition des symptômes, et/ou à la charge virale plus élevée dans les voies respiratoires suite à une infection CoV-2."
Selon l'environnement et les surfaces
D'après cette étude, pour la survie dans l'air en conditions de laboratoire, au bout de 3 heures plus rien n'est observé. "La transmission par aérosols reste donc une question ouverte : elle paraît possible dans un environnement confiné mais peu envisageable dans un espace aéré. La question de la quantité de virus utile à une transmission atteignant une autre personne n'a jusqu'ici pas pu être quantifiée. La distanciation physique d'au moins un mètre permet d'éviter les gouttelettes émises dans l'air, qui retombent au sol ou sur les surfaces avoisinantes dans la proximité de la personne émettrice". D'où l'importance de respecter à la lettre les consignes qui ne sont pas dictées par hasard.
Par rapport au temps de survie du Covid-19, "nous restons sur des bonnes indications, mais qui sont toujours à prendre avec des pincettes car il s'agit d'une reproduction in vitro en laboratoire, qui pourraient être différentes des conditions de la vie réelle, explique encore le Dr Jean Ruelle. Sur des surfaces lisses comme les plastiques et l'acier inoxydable, la demi-vie du virus mesurée était respectivement de 5,4 et 6,8 heures, ce qui signifie qu'en 5 à 6 heures la quantité de virus diminue de moitié. Avec la concentration de départ utilisée, mimant en laboratoire la charge virale retrouvée chez un malade, des virus viables ont été retrouvés jusqu'à 72 heures. Pour les autres surfaces testées - le cuivre et le carton, le virus viable disparaît beaucoup plus vite, entre 4 et 24h".
On parle ici de survie, mais qu'en est-il de sa capacité d'infection? "Ceci ne nous dit effectivement pas si la plus faible quantité de virus viable détectée dans ces expériences est suffisante pour infecter une personne, mais elle nous informe qu'au-delà de ces durées on ne retrouve plus de virus viable, précise le chercheur. Dans l'intervalle de durée, une contamination semble donc possible."
Une mandarine venue d'un pays fort touché par l'épidémie peut-elle nous contaminer?
Quant à la question de la contamination par exemple via le courrier et les colis en carton, elle semble en l'état actuel des connaissances "hautement improbable". "Il faudrait qu'une personne malade ait toussé sur votre courrier dans les derniers moments d'acheminement, et que votre manipulation du courrier ou colis permette au virus de quitter le carton pour qu'il entre dans les voies respiratoires, explique le Dr Jean Ruelle. Pour éliminer tout risque pour les personnes les plus inquiètes, un lavage des mains après dépouillement du courrier/colis est suffisant".
Est-ce différent pour un colis d'alimentation? Une caissette de mandarines venue d'Espagne, par exemple, pourrait-elle présenter un quelconque danger de contamination? "La survie du virus sur les fruits et légumes n'a jamais été décrite, répond encore le scientifique de l'UCLouvain. Les mandarines sont épluchées et ne pourraient donc en aucun cas être contaminées. Même pour les fruits et légumes qui sont consommés sans être épluchés, la transmission via l'alimentation n'a jamais été observée pour aucun virus de la famille des coronavirus".
Pour ce qui est des températures propices à la survie du virus, et plus particulièrement de la chaleur, "nous avons des données pour le SARS CoV-1 qui ont été publiées, explique le chercheur. L'étude dont nous parlons permet d'envisager que les deux virus sont similaires. Le CoV-1 est stable jusqu'à 2 heures à 37°C, par contre à partir de 56°C et à des températures supérieures, la capacité du virus à être infectieux diminue plus rapidement. Une exposition aux UV pendant une heure supprime toute infectivité".
Quant au milieu aquatique, et par exemple les piscines, à nouveau la transmission est hautement improbable "vu le volume de d'eau et la dilution des particules virales, et les moyens de désinfection utilisé, affirme le Dr Ruelle, avant d'ajouter, non sans humour, que le risque est de zéro lorsque la piscine est fermée..."