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An Okapi is pictured in its enclosure at Antwerp's zoo, Belgium, March 28, 2019. REUTERS/Francois Lenoir
FRANCOIS LENOIR / REUTERS

Okapis, gorilles, girafes… Kinshasa est un paradis pour trafiquants d’espèces menacées

Par  (Kinshasa, envoyé spécial)
Publié le 21 décembre 2020 à 02h28, modifié le 22 décembre 2020 à 12h05

Temps de Lecture 8 min.

C’est un pressing qui ne paie pas de mine. Trois murs lépreux, une vitrine sale ouvrant sur une pièce où pendent des vêtements nettoyés à sec. Voilà l’une des planques utilisées dans Kinshasa par Jules, escogriffe au visage balafré et à l’œil torve. Rien de plus discret qu’un banal petit commerce perdu dans un quartier populaire de la capitale congolaise, métropole chaotique de plus de 15 millions d’habitants. Les prix affichés à l’entrée sont en monnaie locale, mais Jules, lui, pense en dollars lorsqu’il sort d’un sac en toile une peau pliée d’animal et l’étire au sol. Elle est épaisse, d’un marron foncé sur le corps, plus clair sur la tête, zébré sur le haut des pattes. C’est une peau d’okapi (Okapia johnstoni), un mammifère encore mystérieux, parmi les plus rares qui soit.

Cette espèce en voie de disparition ne se trouve à l’état sauvage que dans la forêt tropicale du nord-est de la République démocratique du Congo (RDC), dont elle est l’emblème national. Taiseux jusque-là, comme tout bon trafiquant, Jules ajoute les sabots et ne lâche que trois mots : « Dix mille dollars. » Le tout se revendrait aisément quatre ou cinq fois plus en Asie, en Europe et dans les pays du Golfe, où la peau d’un animal si méconnu qu’il semble sorti de la mythologie fascine les initiés.

« Un marché criminel »

A plusieurs milliers de kilomètres à l’est de Kinshasa, dans la province de l’Ituri, une centaine de rangers traquent les prédateurs, qu’ils soient chasseurs, braconniers, agriculteurs ou bien encore orpailleurs ou miliciens, très actifs dans la Réserve de faune à okapis (RFO). Inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, celle-ci s’étire sur 13 726 km2 autour du village d’Epulu, du nom de la rivière qui traverse la forêt dense et humide où évolue la majorité des okapis, soit entre 10 000 et 15 000 bêtes. Un recensement plus précis est impossible tant cet animal est solitaire et plus difficile à observer pour les conservationnistes qu’à chasser pour les communautés locales. Une certitude, tout de même : les scientifiques estiment que sa population s’est réduite de moitié depuis l’an 2000 et alertent sur les risques d’extinction.

Au centre de recherche de la RFO, à Epulu, il n’y a plus le moindre okapi en captivité depuis 2012. Le 24 juin de cette année-là, un chef de guerre des environs et ses miliciens font irruption au quartier général de la réserve, saccagent les locaux et massacrent les quatorze okapis captifs. Depuis, le projet de recapture de trois spécimens – deux femelles et un mâle – n’a pas pu se concrétiser, car la situation sécuritaire demeure instable dans cette région en proie aux violences des groupes armés. Sans oublier l’intensification de l’exploitation illégale de l’or.

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