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Santé

Méta-analyse : l'hydroxychloroquine combinée à l'azithromycine augmentent le risque de mortalité dans le traitement du Covid-19

L'hydroxychloroquine seule n'a aucun effet positif ou négatif dans le traitement du Covid-19. La combinaison hydroxychloroquine et azithromycine augmente le risque de mortalité par rapport aux soins standards. Ce sont les conclusions de la plus grosse méta-analyse menée à ce jour sur le protocole défendu par le professeur Didier Raoult.

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Un comprimé d'hydroxychloroquine dans une pharmacie de Provo, Utah, le 15 juin 2020

L'hydroxychloroquine combinée à l'azithromycine augmente la mortalité dans le traitement du Covid-19.

AFP/Archives - GEORGE FREY

MÉTA-ANALYSE. C'est une étude d'ampleur sur l’efficacité de l'hydroxychloroquine contre la Covid-19 qui est publiée dans Clinical Microbiologie and Infection*, le journal officiel de la société savante européenne de microbiologie clinique et maladies infectieuse (European Society of Clinical Microbiology and Infectious Diseases). Ses conclusions sont claires : l’hydroxychloroquine (HCQ) seule n’a pas d’effet, ni positif, ni négatif, sur les malades hospitalisés pour le Covid-19. Pire : le traitement combinant hydroxychloroquine et azithromycine (AZI) préconisé par le professeur Didier Raoult, directeur de l’Institut Hospitalo-Universitaire Méditerranée infection à Marseille, augmente le risque de mortalité !

Une étude qui suit les plus strictes recommandations en matière de méthodologie des études médicales

Dans le détail, l’étude a comparé l’effet de l’HCQ avec ou sans AZI aux soins standards dans les hôpitaux (groupe contrôle). Or, quand les patients reçoivent le traitement HCQ + AZI le risque de mortalité augmente de 27 % par rapport aux patients qui reçoivent les soins standards (oxygénation, antidouleurs, anti-inflammatoires etc.). “Il s’agit en fait d’un risque relatif, un rapport de survenu du décès entre ceux qui reçoivent le traitement et ceux qui ne le reçoivent pas. Pour être plus précis, il faut calculer le risque absolu qui tient compte de la mortalité de base pour les patients hospitalisés tous traitements confondus. Dans ce cas le risque de mortalité pour les patients traités par HCQ +AZI passe de 27% à 7%. L’effet est moindre mais toujours délétère,” explique Thibault Fiolet, doctorant en épidémiologie à l’Inserm/université Paris-Saclay et premier auteur de la publication.

Cette étude est importante à plusieurs titres. D’abord parce qu’elle suit les recommandations les plus strictes en la matière, celles édictées par Cochrane, institution internationale de référence pour la méthodologie des études médicales. Ensuite parce qu’elle est publiée dans l’un des meilleurs journaux d’infectiologie. Enfin, il s’agit d’une méta-analyse, considérée comme le plus haut niveau de preuve pour une étude scientifique. Une méta-analyse compile l’ensemble des études publiées sur un sujet pour ne retenir que les meilleures afin d’en dégager une tendance voire un consensus. Ce n’est donc pas une seule étude qui montre que l’HCQ n’est pas efficace, mais un ensemble d’études.

PCR. “Dans cette analyse nous avons collecté et examiné 839 articles scientifiques parus ces derniers mois" sur le Covid-19 "et retenu 29 en tenant compte de certains critères”, indique Mathieu Rebeaud, doctorant en biochimie à l’université de Lausanne (Suisse) et coauteur de la publication. Il fallait par exemple que les cas de Covid-19 aient été validés par PCR, c’est-à-dire une analyse génétique qui confirme la présence du coronavirus chez le patient. Elles devaient aussi comparer le traitement HCQ ou HCQ + AZI à un groupe contrôle (recevant les soins standards). Il est effectivement impossible d’évaluer l’efficacité d’un traitement s’il n’est pas comparé à un groupe contrôle qui ne reçoit pas ce traitement. Par ailleurs, ces études devaient mesurer la mortalité des patients hospitalisés puisque le but était de savoir si justement le traitement avait un effet sur la mortalité.

"Ce sont les plus gros effectifs réunis dans une méta-analyse sur le Covid-19"

Parmi les 29 études retenues, certaines ont été exclues après examen détaillé car elles présentaient des risques de biais trop importants pouvant nuire à l'analyse finale suivant les recommandations de Cochrane. À l’issue de cette sélection, il restait donc 17 études comparant l’HCQ aux soins standards (groupe contrôle) et 7 comparant la combinaison HCQ + AZI. Soit environ 12.000 patients hospitalisés traités à l’HCQ, 8000 à HCQ + AZI et 13.000 ayant reçu les soins standards (contrôle). “Ce sont les plus gros effectifs réunis dans une méta-analyse sur le Covid-19. Les méta-analyses précédentes rassemblaient moins de 6 ou 7 études”, précise Thibault Fiolet.

BIAIS. Malgré la robustesse de cette analyse, les auteurs évoquent quelques limites. La plupart des études retenues sont observationnelles, c’est-à-dire qu’elles ont été menées a posteriori sur les données hospitalières. Elles peuvent donc présenter des biais. Par exemple, certains patients reçoivent le traitement dès leur entrée à l'hôpital, d’autres après plusieurs jours d’hospitalisation. De quoi brouiller l’évaluation des effets du traitement. Autre problème, les patients ont pu recevoir d’autres traitements en plus de l’HCQ et de l’AZI comme par exemple des corticostéroïdes. Dans ce cas il est impossible de dire à quelle molécule l’effet observé peut être attribué.

Toutefois les résultats de cette méta-analyse coïncident avec les précédentes qui pour la plupart ne montrent pas d’effet favorable de l’HCQ seule ou combinée avec l’AZI. Par ailleurs, l’évaluation de ces traitements a été arrêtée dans trois grands essais cliniques internationaux (DisCoveRy en Europe, l'essai du US NIH aux États-Unis et Solidarity à l’OMS) faute de preuve de leur efficacité. C’est donc un consensus qui se dégage : l’hydroxychloroquine seule ou combinée à l’azithromycine ne semble pas être efficace contre le Covid-19 chez les patients hospitalisés.

* Effect of hydroxychloroquine with or without azithromycin on the mortality of COVID-19 patients: a systematic review and meta-analysis, Thibault Fiolet, Anthony Guihur, Mathieu Rebeaud, Matthieu Mulot, Nathan Peiffer-Smadja, Yahya Mahamat-Saleh

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