Pénurie de carburant : combien gagnent réellement les salariés de Total ?

  • Pénuries d'essence : quel est le vrai salaire des grévistes ?
    Pénuries d'essence : quel est le vrai salaire des grévistes ? EPA - GUILLAUME HORCAJUELO
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ELISE DO MARCOLINO

Alors que la grève des salariés de raffineries a été reconduite, la direction de Total annonce dans un communiqué du 9 octobre des salaires moyens pour les opérateurs de 5 000 euros par mois. La CGT a contesté ces chiffres et évoqué des salaires allant de 1 923 à 3 075 euros bruts mensuels.

Combien gagnent réellement les salariés des raffineries ? Les groupes Total et Exxonmobil avancent des chiffres moyens deux à trois fois plus élevés que la CGT. Tandis que les syndicats demandent une revalorisation de 10 % des salaires de 2022, la direction de Total se félicite d’avoir déjà augmenté les rémunérations de 3, 5 % par rapport à 2021.

Des salaires à 5 000 euros chez Total ?

Dans un communiqué du 10 octobre, la direction de Total parle de salaires de “5 000 euros bruts par mois, y compris intéressement-participation”. Cela revient à 4 300 euros bruts mensuels sans ces primes. Ce chiffre concerne les ouvriers et les agents de maîtrise, excluant les cadres dans l’équation.

La CGT conteste les chiffres

Le syndicat CGT a démenti le communiqué du groupe, évoquant des chiffres bien moins élevés. Le coordinateur de la CGT pour TotalEnergies a donné à BFMTV des salaires plus modestes. À l’embauche, il s’agirait de 1 923 euros bruts, évoluant tout au plus à 3 075 euros avec le treizième mois pour les salariés non-cadres. Sur RMC, le secrétaire général de la CGT chimie, Emmanuel Lepine, a fermement contesté le chiffre des 5 000 euros "Je conteste formellement et avec la plus grande énergie ce chiffre".

Le secrétaire général de CGT Exxon Mobile, Germinal Lancelin, s’est exprimé sur la rémunération des employés. Les salaires évoluent de 2 120 euros à 4 500 euros après vingt ans de carrière.

La méthode de calcul remise en question

Ces différences de chiffres pourraient s’expliquer par la méthode de calcul utilisée. Ni TotalEnergies, ni les syndicats n’ont donné de détails, mais plusieurs facteurs auraient pu affecter de façon notable leurs résultats. À commencer par le fait que certains chiffres moyens ne reflètent pas nécessairement la réalité concernant la majorité des salaires. Les chiffres de TotalEnegies, par exemple, ne font aucune différence entre les salaires de début et de fin de carrière.

La seule moyenne de 5 000 euros donnée dans son communiqué ne permet pas de connaître le montant minimum et maximum du salaire, que l’on pourrait comparer à ceux donnés par les syndicats. Contacté par la Dépêche, le coordinateur social de la CGT à TotalEnergies, Eric Sellini parle pourtant de plusieurs centaines d’euros d’écart mensuel.

Le syndicat conteste également la nature de l'augmentation de 3,5 % revendiquée par TotalEnegie. Pour lui, il s'agirait davantage d’une prime moyenne attribuée au cas par cas que d’une réelle augmentation. Elle aurait été établie à partir d’une réelle augmentation de 2,75 % ne concernant que les salariés OETAM (ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise).

La question des primes a pu fausser les calculs de la CGT ou de TotalEnergies, tout comme ce que le groupe appelle les intéressements et participations. Ces primes fondées sur la performance des salariés en entreprise et le versement d'une "quote-part" en fonction des bénéfices effectués, s'élevaient à 9 108 euros en moyenne, avec un minimum de 7 250 euros par an. Ces chiffres sont bien plus élevés que la moyenne française, évaluée à 1 702 euros en moyenne en 2022.

Autre variable importante : la nature des contrats. Les chiffres ont pu varier en fonction de la présence, ou non, de données sur la rémunération des intérimaires ou des travailleurs en CDD. Éric Sellini, a évoqué des critères qui changeraient le résultat obtenu “Ils ont aussi pu compter les primes diverses comme celle de pénibilité ou de rentrée scolaire pour ceux qui ont des enfants.”

La situation risque de durer

La CGT espérait convenir d’une date fixe avec les principaux groupes, Total en tête de liste, afin de discuter de la revalorisation des salaires. Total propose d’avancer de novembre à octobre la date des négociations salariales si le mouvement de grève cesse. Dans un communiqué du lundi 10 octobre transmis à l’AFP, le syndicat a répondu négativement à cette proposition, y voyant une forme de chantage. “Pour l’instant, on n’a pas de date de négociation, on n’a pas de proposition" a déclaré Emmanuel Lépine.

Un tiers des stations à sec

Ce mardi, alors que la grève vient d’être reconduite, un tiers des stations en métropole sont à sec. Le gouvernement a demandé aux préfectures d’interdire le remplissage de jerricanes sur l’ensemble du territoire. Le directeur du raffinage Europe TotalEnergies, Jean-Marc Durand, évoquait lundi sur BFMTV qu’il faudrait plus d’une semaine pour “retrouver un rythme normal”, même si la situation venait à se débloquer.

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